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Covitgate : Un test à 17 500 F CFA l’unité au lieu de 2 932 F CFA . Les dessous du gros scandale financier de l’histoire du pays [Jeune Afrique]

Un document d’une vingtaine de pages daté de mars 2021 a fuité sur les réseaux sociaux le 19 mai. La chambre des comptes y dresse le bilan de l’utilisation du fonds alloué dans la lutte contre le Covid-19.


Doté de 180 milliards de francs CFA, cette dotation du FMI devait servir, entre autres, à l’achat d’équipements de protection, de tests, d’ambulances, de médicaments, et à la prise en charge de la quarantaine des voyageurs.

Le document de cour des comptes relève cependant que la gestion des fonds Covids fait l’objet de plusieurs controverses.
Dans un article publié sur son site internet en milieu de semaine, et réservé exclusivement à ses lecteurs,  l’hebdomadaire Jeune Afrique revient sur ce qui pourrait l’un des plus gros scandales financiers de l’histoire du pays.

Le journal note une opacité dans la passation des marchés, dépassements des budgets alloués, détournements, surfacturations flagrantes… Le tableau dressé est accablant, avec la société Mediline Medical Cameroun (MMC) qui a bénéficié d’un quasi-monopole, raflant 90 % des tests achetés pour 95 % des crédits engagés, au détriment de deux autres prestataires locaux ayant pourtant une expérience « avérée » dans la vente des médicaments et dispositifs médicaux.

Extrait :

Les officiers de police judiciaire du TCS scrutent particulièrement l’implication de certains prestataires, soupçonnés par le rapport d’audit de la chambre des comptes de la cour suprême d’avoir obtenu des marchés par des moyens peu licites. Principal acteur visé : l’entrepreneur camerounais Mohamadou Dabo, consul honoraire de Corée du Sud, dont le nom revient dans les plus importants contrats passés par le ministère de la Santé.

Monopole et surfacturation

Deux entreprises contrôlées par Mohamadou Dabo sont épinglées par le document de travail des enquêteurs. La première, Mediline Medical Cameroon (MMC), dans laquelle l’homme l’affaires est actionnaire à travers sa société Moda Corporation, aurait obtenu un « quasi-monopole » dans la fourniture des tests de dépistage du Covid-19, soit 89 % des parts de marchés équivalent à 24,5 milliards de F CFA (37 millions d’euros), contre 10 % pour deux autres prestataires locaux ayant un meilleur avantage concurrentiel.
La seconde, Moda Holding Hong Kong, filiale de Moda Corporation basée à Yaoundé dont Dabo est le patron, a été chargée de transporter les tests de dépistage achetés par l’entreprise MMC auprès de son fournisseur coréen SD Biosensor. Selon la chambre des comptes, Moda Holding aurait pratiqué des « prix (de transport) disproportionnés » qu’elle a facturés au ministère de la Santé via MMC.
Des tarifs qui ont porté le prix du test de dépistage de marque Standard Q Covid-19 AG Test à 17 500 F CFA l’unité au lieu de 7 084 F CFA si le Cameroun s’était directement adressé au fabricant SD Biosensor, ou 2 932 F CFA s’il s’était adressé au Fonds mondial de lutte contre le paludisme, le VIH et la tuberculose. En tout état de cause, les opérations menées par ces deux entreprises placées sous la coupe de Mohamadou Dabo auraient fait perdre au Cameroun au moins 14 milliards de F CFA.

Des ministres embarrassés

Comment des contrats aussi importants ont-ils été conclus avec des entreprises aussi inexpérimentées ? La chambre des comptes révèle en effet que jusqu’au 2 juin 2020, MMC ne justifiait d’aucune activité, alors même qu’elle été crée le 13 septembre 2017. La réponse est en tout cas bien gênante pour le pouvoir et tout le monde se rejette cette patate chaude.
Au ministère de la Santé, on assure ainsi avoir suivi les instructions du Premier ministre, Joseph Dion Ngute qui, dans un courrier signé le 23 juin 2020, demandait à Manaouda Malachie d’octroyer un contrat de livraison de 3 millions de tests « au partenaire coréen » Mediline. « Le Premier ministre a bien donné cette instruction, reconnait un de ses proches. Mais sa lettre précise clairement au responsable du ministère de la Santé de s’assurer de l’application effective de la mercuriale des prix en vigueur ».
Un temps accusé d’avoir fixé des prix bien supérieurs à ceux du marché, le ministre du Commerce, dont les services ont la charge de concevoir les mercuriales de l’État, s’est lui aussi défendu en indiquant à l’opinion que son ministère avait bien retenu le prix de 17 500 F CFA, mais pour un kit de 25 tests et non pour un seul test.

Droit dans ses bottes

Au cœur du scandale, Mohamadou Dabo reste droit dans ses bottes. Fidèle à la discrétion qui le caractérise, l’entrepreneur rejette toute sollicitation médiatique. C’est l’une des marques de fabrique de ce peul originaire du Nord du Cameroun, et surtout l’un des secrets de sa réussite. Car dans un environnement où la prospérité en affaire est souvent proportionnelle à l’engagement politique aux cotés du parti au pouvoir, il a fait le choix d’évoluer dans l’ombre, bien loin des joutes politiques publiques