×

Veuillez désactiver le bloqueur de publicité SVP!

Vous n'aimez pas la publicité dans les pages, nous le comprenons bien! Par contre, un site d'information sans pubicité ne pourra pas survivre sans revenu publicitaire.

Hommage au Bâtonnier Maître Francis SAMA

Maître Martin LONGO Avocat

C’est avec une grande tristesse que nous avons appris que le Bâtonnier Francis SAMA s’est éteint le 7 juin 2020. C’est avec émotion, qu’il m’échoit de lui rendre hommage, en ma qualité de doyen des avocats camerounais du barreau de Bordeaux.

En dépit de notre antagonisme politique, je voudrais manifester toute mon estime, mon amitié, mon admiration pour le Bâtonnier Francis SAMA, qui restera un Bâtonnier historique, une grande figure du Barreau du Cameroun. Il était un avocat résolu et intransigeant sur les principes.

La défense de la Défense lui était chère.

Il a su faire partager aux membres du barreau du Cameroun, l’ambition qu’il nourrissait pour la profession, dans l’intérêt non seulement des avocats eux-mêmes, en particulier des avocats stagiaires et des jeunes avocats, mais également pour l’évolution de la justice.

Il avait parfaitement compris, que le nombre d'avocats et surtout leur rôle essentiel dans la cité ont une influence directe sur le progrès de l'État de droit dans une société et qu’une société ne peut donc être efficacement régie par le droit, que dans la mesure où les juristes pénètrent en profondeur dans tous les rouages de son activité.

Ce qui explique sa volonté de bâtir un Barreau du Cameroun Indépendant, Fort et respecté, par le nombre des avocats et dans son organisation.

Malgré les crispations, les résistances, les critiques, il a ainsi ouvert les voies, non de l’aventure, ou de l’abaissement de notre profession, mais de l’avenir, en œuvrant au cours de son mandat (2015-2018) à l’accès du plus grand nombre de jeunes confrères à la profession d’avocat : 1.400 avocats stagiaires.

Son exemple a été suivi avec mérite par l’actuel Bâtonnier, en exercice, Maître Pathié TCHAKOUNTE.

C’est également pendant l'exercice de son mandat de Bâtonnier et sous son impulsion, avec l'aval et l'appui de son bureau, que l'Ordre fit l'acquisition d’un vaste domaine foncier, pour la construction d’édifices de prestige dédiés aux avocats et d’un siège.

Il a dû faire face à une campagne calomnieuse et odieuse de ses détracteurs, qui vitupéraient qu’il n’avait acheté aucun terrain, pour le compte du barreau du Cameroun.

L’histoire lui a donné raison, le titre foncier valable et valide a été dûment constaté. Son honneur rétabli, mais blessé, il décida de s’éloigner de toute activité ordinale.

Conscient des enjeux pour la formation initiale et continue des jeunes avocats stagiaires, en 2017, le Bâtonnier Francis SAMA a su saisir l’opportunité du projet de jumelage entre les barreaux de Bordeaux et du Cameroun, dont j’ai été le promoteur, avec la caution de l’ancien Bâtonnier du barreau de Bordeaux, Maître Bernard QUESNEL, pour signer et sceller une véritable et fructueuse coopération, qui offre des possibilités de stages en cabinet ou en juridiction à Bordeaux à des avocats stagiaires camerounais et des échanges en matière de documentation numérique.

La signature des conventions de jumelage s’est effectuée en deux étapes à Bordeaux, au cours d’une cérémonie qui clôturait la rentrée solennelle de la Conférence de Stage, pendant laquelle la pleine mesure de ses qualités, son ouverture d’esprit et son humanisme, lui valurent la médaille d’Or du barreau de Bordeaux.

Il conduisait une forte délégation composée d’éminents magistrats du Cameroun, notamment la Présidente du Tribunal de Grande Instance de Bamenda, un Procureur de la République et des avocats, les confrères Abdoul Bagui, Sylvain Souop, Eugène Balemaken, Philippe MEMONG.

En associant dans sa délégation des avocats et des magistrats, il avait compris que ces acteurs inséparables de l’œuvre de Justice pouvaient la faire avancer, tout en croisant comme les fils d’une même toile, et qui ne doivent pas se croiser, comme se croise le fer.

Puis, au Cameroun, à l’invitation du Bâtonnier Francis SAMA, assisté par son  équipe, un accueil inoubliable a été réservé au Vice-Batonnier du barreau de Bordeaux et à sa délégation.

C’était également un homme qui se distinguait par sa délicatesse, son élégance, sa courtoisie, sa grande culture et son sens de l'écoute.

J’ai pu apprécier son profond attachement aux valeurs de notre profession et de son serment, à la déontologie, et notamment, l’indépendance, la dignité, qui assurent à la profession d’avocat sa noblesse.

Il aimait à souligner dans nos échanges l’obligation permanente de courtoisie, s’offusquant que des confrères la méconnaissent.

Cette courtoisie que l’avocat doit à ses clients, aux magistrats et à ses confrères. Il était très sensible à la confraternité.

Il marquera l’histoire du Cameroun, par son appel lancé le 9 juin 2017 au cours de l’audience solennelle de prestation de serment de sept nouveaux avocats anglophones, à cesser la grève.

Sur tous les sujets qu’il abordait, le Bâtonnier Francis SAMA n’avait peur, ni de penser, ni de dire.

Sa force d’âme était faite des convictions et des valeurs, qui avaient certainement baigné son enfance et sa jeunesse, je crois, auprès du Chairman, Mr John Fru Ndi, qu’il m’avait dit être son père.

C’était donc un homme d’exception qui aura marqué par son courage le pays et le barreau du Cameroun, à qui il a tant donné dans sa vie professionnelle, pour les jeunes avocats.

Sa mémoire s'est inscrite définitivement dans la galaxie, telle une étoile qui ne s’éteindra jamais.

Comme tous les visionnaires, il continua jusqu’au bout à impulser des idées neuves et de la tolérance entre les camerounais.

Parce que nous sommes des avocats, mon Frère et Cher Confrère, puisse ton combat contre toutes formes d’arbitraire, contre l’injustice, et pour un Barreau du Cameroun Indépendant et Fort continuer d’inspirer les jeunes confrères, avec au cœur, comme toi, une invincible espérance.

Un monument mérite d’être érigé par l’Ordre des Avocats en ton souvenir, sur le terrain acquis par tes soins pour le barreau.

Nous savons qu'aucune parole ne saurait apaiser la peine de ceux qui restent.

Nous nous associons à la douleur de la famille, de son épouse, de sa fille, à qui nous tenons à témoigner de notre soutien particulier et à laquelle nous adressons nos plus sincères condoléances.

 

Maître Martin Longo

Avocat aux Barreaux de Bordeaux et du Cameroun

Doyen des Avocats camerounais au Barreau de Bordeaux

Membre de l’Association des Avocats Pénalistes Français