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Opinion : « Le Complexe d’Olembe, le plus grand crime économique jamais commis au Cameroun »

Si toute la clarté n’y est pas apportée par celui qui en est le suprême ordonnateur, le Chef de l’État, l’histoire retiendra qu’au prétexte ou à l’occasion de la CHAN- CAN, il a été commis le plus grand crime économique en continu, étalé sur plusieurs années, impuni, contre notre pays. Certains croient pouvoir dissimuler cet fait honteux en brandissant à l’encan le nom du Président Biya comme un rideau de fumée pour que le peuple n’y voit rien.

Ces thuriféraires tentent de faire avaler le mensonge grossier que ces infrastructures sont un cadeau fait par le Président Biya à la jeunesse. De don ou de cadeau à la jeunesse il n’y en a point. Ce qui doit en revanche être mis en exergue est le fait que c’est la stabilité du pays dont chaque Camerounais est garant qui rassurent les prêteurs d’argent et que ce sont les impôts que nous payons et l’avenir hypothéqué de nos enfants qui permettront que soit payées les dettes colossales ainsi contractées par le pays pour se procurer ces infrastructures.

Pour lui en faciliter l’entendement, le peuple doit savoir qu’il s’agit d’un projet qui engloutira environ 1000 milliards F, soit à peu près de quoi construire une autoroute de six voies entre Douala et Yaoundé. Pour rendre encore plus saisissable l’importance du problème, de nos jours, le budget annuel du Cameroun étant de 4000 milliards de Francs CFA; le coût total de ce projet représente donc à peu près 25 % d’un tel budget.

L’ émoi du citoyen lambda sera encore plus grand lorsqu’il apprendra que les travaux sur le site d’Olembe avait donné lieu à un contrat de 163 milliards F signé entre l’entreprise italienne PICINNI, maître d’oeuvre et l’État du Cameroun, maître d’ouvrage. Au moment où ce contrat est résilié par la partie camerounaise, le maître d’œuvre italien déclare avoir déjà réalisé 90% des travaux. Le coût de l’ achèvement des 10% des travaux à réaliser devrait donc ressortir plus ou moins à 16-20 milliards F, montant que raisonnablement on s’attendait à voir l’État rechercher, après bien évidemment qu’un audit aie permis d’évaluer les travaux effectués et de valider le montant des fonds nécessaires pour achever les travaux .

Justifiée est donc l’émoi des populations d’apprendre que sans un audit, dans une totale opacité, le Ministre en charge est autorisé par le Chef de l’État à contracté auprès de la banque britannique Standard Chartered et la Banque Publique d’Investissement BPI France

une dette de 55 milliards F au taux d’intérêt commercial de 7%. Une telle démarche révèle deux graves anomalies. La première est qu’en l’absence d’un audit et n’ayant en possession que l’information fournie par le maître d’œuvre, le montant du prêt ainsi envisagé représente 300% du montant qui aurait été nécessaire pour achever les 10 % de travaux restant d’après l’évaluation de Piccini.

La deuxième anomalie est que la formule de financement retenue est absolument inappropriée tant pour le profil du client qu’est l’état du Cameroun que pour le taux d’intérêt appliqué. La meilleure des formules de financement aurait sans doute été un prêt concessionnel à 1 ou 2 % auprès d’un de nos partenaires dans le cadre de la coopération multi ou bilatérale. Une formule moyenne aurait été l’émission de Bons de Trésor à 10 ans a un taux de 3-4 %. La pire des formule est celle qui a été retenue à savoir un prêt commercial à 7-8 % alors même que lors de la revue du FMI du mois d’Octobre dernier, le Cameroun avait pris l’engagement de ne plus s’endetter à un taux commercial.

Pour étouffer les questionnements sur ces anomalies et détourner l’attention du soupçon de l’ampleur de corruption qui sévit tout au long de l’organisation de cette CHAN- CAN, certains ramènent et événement à une hagiographie du Président de la République.

La Vérité est moins reluisante. La CHAN – CAN pourra se révéler être le plus grand crime économique jamais commis au Cameroun, crime rendu possible par la mise en place d’une» Task Force» au niveau du Secrétariat Général à la Présidence de la République. En mettant en place cette TASK FORCE, le Président Biya se référait sans doute à l’époque où il était lui même SG/ PRC, lorsqu’en 1972, une manifestation de même nature bien que d ‘ampleur différente s’était déroulé. Manifestement, il se sera trompé d’époque mais aussi… d’individus.

Revenant au dispositif mis en place pour soutenir la» Task Force«, il s’est agit de deux mesures autorisées par la Chef de l’État, chacune de ces mesures ayant facilité ou nourri les dérives par rapport aux principes régissant une gouvernance financière saine de l’État.

La première de ces mesures est l’instauration du «gré à gré» dans l’attribution des 50 marchés sur 60; cette décision aura eu pour effet de neutraliser le mécanisme permettant que pour un ouvrage, l’aboutissement de la procédure d’adjudication entre des concurrents garantissent la meilleure qualité du service au meilleur prix.

La seconde de ces mesures est l’instauration d’un *guichet unique* où c’est le même agent qui en amont, octroie les marchés, et qui, en aval ordonne le paiement des décomptes, sans que systématiquement, le visa du maître d’ouvrage délégué ne soit acquis.

L’effet cumulé de ces deux mesures a été de favoriser l’explosion des surfacturation avec l’exemple de chargement de 10 tonnes de sable Sanaga payé à 70000 Francs CFA à Monatele et facturé à 700000 Francs CFA cinquante km plus loin à Olembe.

De tels excès de boulimie prédatrice et de corruption n’auraient pu se perpétrer et se perpétuer sans une prise d’intérêt de ceux là qui validaient les devis justifiant l’attribution des marché en gré à gré, et surtout, ces mêmes qui autorisaient le paiement des décomptes des travaux -prétendument quelque fois- effectués.

L’exemple du Président Ahidjo en 1972

Et pourtant, à l’école de l’ Histoire, le régime actuel doit apprendre comment ce type de situation devrait être traité. Lorsqu’après la CAN de 1972 qui avait donné lieu à la construction des deux grands stades Omnisports Yaoundé et de Douala sans la moindre fausse note au niveau des chantiers, des rumeurs avaient couru sur des opérations frauduleuses de billetterie, le Président Ahidjo avait ordonné immédiatement l’ouverture d’une enquête de police judiciaire. Le rapport subséquent ayant établi une pratique de double billetterie, l’affaire avait été transmis à la justice.

Il s’en était suivi une condamnation sans coup férir de hauts responsables du Comité d’Organisation dont notamment Kouam Samuel, un des milliardaires les plus en vue de l’époque, Ekoko Alfred, un haut cadre financier. Ce traitement rigoureux ordonné par le Président de la République avait eu le double avantage de rappeler aux uns et aux autres l’impératif absolu du respect des exigences d’une gestion financière saine et surtout d’opérer une catharsis qui soulageait le peuple camerounais de l’ humiliation d’avoir été éliminé de la compétition en demi-finale par le Congo mené par» Mbono Sorcier«.

Il y a donc ici occasion de s’interroger sur les raisons pour lesquelles le Président Biya ne tire politiquement pas une leçon de la pratique de son illustre prédécesseur et mentor, lui qui à l’époque était déjà Secrétaire Général de la Présidence de la République et qui occupait donc la fonction sur laquelle converge aujourd’hui tous les doutes et les soupçons d’une gestion calamiteuse du volet financier de la mission de la Task Force mise en place par lui même.

Le fait le plus troublant est de voir le Président de la République s’interdire de commanditer un audit financier effectué par un Cabinet à l’expertise internationalement reconnu dont seuls les conclusions fourniraient un éclairage sur les responsabilités éventuelles des mauvaises pratiques enregistrées dans ce projet dans ses phases antérieures, mais surtout renseigneraient sur les besoins financiers nécessaires pour son achèvement.

La parole du Président attendue : un droit du peuple

Le Président de la Republique est certainement conscient que sa posture de tolérance voire de bienveillance à l’égard de certains commis de son entourage interroge. Vouloir passer en force en mobilisant l’argent ou croire pouvoir faire passer la tempête en gardant le silence pourrait se révéler être une faute politique majeure, sur le moyen terme. Ce qu’attendent de lui un frange significative de l’opinion est de le voir commettre cet audit indépendant dont la restitution devra ABSOLUMENT être publique. C’est une exigence republicaine de transparence par rapport à laquelle tous de ces temps, nous ne saurons rester passifs, car notre passivité pourra amener les générations à venir à se demander quel genre de citoyens nous aurons été.

Si le Président de la République ne manifeste pas sa volonté de promouvoir la transparence dans ce dossier, il pourrait lui être prêter d’être l’allié objectif de ceux-là sur lesquels planent de fortes présomptions de corruption. Certains Chefs d’État comme Moboutou Sesse Seko ont raté leur entrée dans l’ Histoire de cette manière.

Des légions entières de citoyens écoeurés par une certaine tolérance ou une pratique certaine de la prévarication, du népotisme et de la corruption, pourront le jour dit se lever et dire Non. Et dans ce mouvement, ils précipiteront ceux qui s’y attendent le moins dans la géhenne de se voir dénier pour la postérité la vertu républicaine.

Célestin Bedzigui

Président du PAL – Parti de l’Alliance Libérale