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Portrait : Félix Fokoua, l’artiste numérique qui a conçu la mascotte de la CAN 2021

Les traits griffonnés, les traits de crayon imparfaits… le Camerounais Félix Fokoua feuillette son premier cahier de dessin avec nostalgie. Aujourd’hui, sa tablette électronique et son ordinateur sont devenus les outils indispensables à l’exercice de son art.

A 29 ans, couronné de plusieurs récompenses internationales, il a percé au Cameroun, où il a dessiné la mascotte de la prochaine Coupe d’Afrique des nations (CAN) de football qui se tiendra en janvier 2022 dans son pays, et commence à se faire un nom pour lui-même à l’étranger.

“Cela n’aurait pas été possible sans le numérique”, a-t-il déclaré à l’AFP. De nombreux jeunes artistes camerounais interrogés affirment que l’outil les a aidés à se lancer professionnellement et à élargir leur vision du monde.

“Quand j’étais jeune, j’étais passionné par la bande dessinée. J’adorais dessiner. Mais je ne pouvais pas imaginer faire de cette passion mon métier”, confie Félix Fokoua.

Il est diplômé en biochimie et, lorsque sa mère ouvre un cybercafé, il rejoint Facebook et suit avec avidité des groupes d’artistes français, américains et japonais, ses premières sources d’inspiration.

Puis il commence à s’intéresser à la création dans son pays. Il dessine, progresse, contacte les créateurs. Pas encore question d’utiliser des tablettes, elles sont quasiment introuvables et très chères au Cameroun au début des années 2010.

Créer pour divertir

C’est par l’intermédiaire d’un oncle en France qu’il en obtient un. Rapidement, il est recruté par Kiro’o Games, le premier studio de jeux vidéo au Cameroun, tout juste créé. Felix apprend à utiliser sa souris et son imagination pour créer de nouveaux décors et personnages.

Puis il a créé sa propre entreprise et a commencé à travailler dans l’illustration numérique, “avec l’idée de promouvoir la culture africaine”. “Quand j’ai commencé, on me disait toujours d’aller dans les ONG, d’expliquer le paludisme, le sida, ça m’agaçait ! Je voulais avant tout divertir”, explique-t-il.

Félix Fokoua expose ses œuvres sur le web, principalement sur Facebook et Instagram. Il reçoit des commandes privées, principalement de l’étranger.

Il crée également une série de “stickers” numériques représentant la culture camerounaise pour les messageries instantanées Whatsapp et Telegram.

Petit à petit, son réseau s’agrandit, ses revenus augmentent et de grandes entreprises africaines comme les groupes de télécommunications MTN et Camtel, ou la plateforme d’achat en ligne Jumia, font appel à lui.

« En Afrique, les artistes ont tout à créer avec de nouvelles règles, un monde à réinventer, une nouvelle culture à développer », s’enthousiasme-t-il.

Pour Nicanor Tatchim, enseignant-chercheur à l’Université de Lille (France), « un nouveau modèle économique est en train d’émerger » avec « de nouvelles pratiques numérisées de production, de diffusion et de « diffusion » des contenus.

Or, « les autorités camerounaises ont inclus le numérique dans le champ du développement industriel » au détriment de l’industrie culturelle, a souligné Tatchim. « La preuve : la question de l’innovation numérique est portée par le ministère des Postes et Télécommunications et non par le ministère des Arts et de la Culture.

Avenir prometteur

Hugues Bertrand Biboum, directeur artistique de Waanda Stoudio, studio de graphisme et d’édition à Yaoundé, admet que “la transformation du secteur est très favorable” et que “la demande internationale augmente” pour les produits numériques africains. Mais il déplore aussi le manque d’intérêt et de soutien du gouvernement.

« L’avenir du secteur est prometteur », déclare Olivier Madiba, fondateur et directeur de Kiro’o Games, basé dans la capitale. “Mais le Cameroun a un énorme retard technique et humain pour réaliser des œuvres qui répondent aux exigences du spectateur.”

“Netflix ou Disney se rendent compte que l’avenir de l’expansion du streaming est en Afrique. Il est donc dans leur intérêt d’avoir un contenu ciblé sur le public local. Mais nous devrons être en mesure de fournir la qualité exigée par ces sociétés”, affirme Madiba.

« Digital et créativité sont les maîtres mots de l’avenir, notamment en Afrique, qui entame sa phase de développement économique », convient M. Tatchim.

Pourtant, le Cameroun, dirigé par l’indétrônable Paul Biya, 88 ans avec près de 39 ans au pouvoir, “est pris entre les injonctions à numériser l’économie des institutions et les réalités socio-politiques” du pays, selon lui.

En 2017, les autorités avaient notamment coupé internet pendant plusieurs mois dans les régions anglophones du Cameroun, qui abritent de nombreuses start-up du numérique, pour contenir la crise séparatiste qui a dégénéré en un conflit qui a fait plus de 3 500 morts. au cours des quatre dernières années.

 

 

Africanews