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Yaoundé : Le Marché du Mfoundi, une fourmilière !

Des « Bayam-sellam » qui exercent leur activité surveillant leurs arrières et  au sacrifice des jours et nuit de sommeil ; des badauds et « bangando » qui font vivre le ghetto. Malgré la différence de leurs profiles, ces acteurs de l’un des plus grands marchés de la capitale politique du Cameroun se ressemblent par quelque chose qui les assemble : Tous « falla le nyama », tous sont donc à la recherche du gagne-pain. 

Situé au centre-ville de Yaoundé entre le pont de la gare et la Société nationale d’investissement, le Marché du Mfoundi est plus communément connu comme le principal marché de fruits et de légumes de la capitale politique du Cameroun. Il couvre aussi tout l’espace situé entre la maison Renault et le petit carrefour « immeuble Prévert ». Créé le 24 aout 1984, cette institution marchande précise sa Direction, a été construite par compartiments représentés par les hangars, où en principe, dans chacun d’eux, l’on devrait vendre uniquement un certain type de produits. Mais à cause de la démographie galopante dans la ville de Yaoundé, « ces hangars ne sont plus à même de satisfaire la demande qui devient importante. Vous constaterez que les gens sont, qui sur les trottoirs, qui sur la chaussée. Parce qu’il y a un problème d’espace qui se pose également. Ça devient un méli-mélo », affirme M. Bengono Emile Moselly, le Directeur du Marché du Mfoundi. C’est un marché permanent ouvert de 6 à 18 heures et comptant au moins 2 500 vendeurs, répartis dans 11 hangars, chacun d’eux subdivisé par secteurs ou encore par produit.

Après le Directeur, il y a la présidente des Bayam-Sellam élue par les commerçants et installée par le Maire de la Ville. Au Marché du Mfoundi, depuis une trentaine d’années, c’est le poste qu’occupe Mme NGUENI Julienne, qui dit avoir été « désignée » par le « premier » directeur du Marché, un blanc du nom de Savramis. « Il est donc venu vers moi explique celle qui se fait « Reine Mère », pour me dire qu’il voulait travailler avec moi comme présidente du Marché de Mfoundi, alors que j’étais encore très jeune. Vous voyez que moi également je ne pouvais pas travailler seule, le marché étant tellement grand. Nous avons donc instauré les sous-chefs dans les hangars ». « Ma façon de gérer le hangar consiste à contrôler ce qui n’est pas bon qui peut venir nous déranger ici, notamment les petits bandits du marché qu’on appelle vulgairement les ²Nanga boko², d’un. De deux, entre nous on doit s’entre-garder. Si tu vois que ta sœur veut faire du mal à l’autre tu peux intervenir ou alerter la haute autorité. Donc je suis là pour contrôler ce qui ne va pas et essayer de réguler », explique Mme Mvondo Virginie, responsable du hangar n°8.

A en croire M. Bengono Emile, « Les bassins de production qui alimentent ce marché sont principalement, la Lékié, le grand-Mbam, la Mefou-et-Akono. De temps en temps, il y a les oranges et quelques produits saisonniers qui viennent du Grand-Nord et parfois même du Nigéria ». « Pour le ravitaillement, chacun y va de sa guise. Parfois on paie les partenaires dans les brousses. Parfois encore, les producteurs quittent avec le produit et viennent te livrer surplace. Pour des raisons de sureté, nous nous sommes nous-mêmes obligés de nous rendre en brousse. Il arrive que vous donniez votre argent à quelqu’un mais il disparait avec », explique Mama Virginie. Ouvert en permanence, les transactions se font à tout moment de la journée, tard dans la soirée ou au petit matin.

Samedi 22 mai 2021, il est 03h 33 minutes au marché du Mfoundi. Une légère pluie vient de rythmer pendant plusieurs heures, les vents nocturnes. Le grand portail de l’entrée principale, sur le côté opposé au lieu-dit Camair, est ouvert à demi et, le portillon à droite entièrement. Postés là, des gardiens filtrent les entrées au rythme des va-et-vient des taxis, cars, canters et camionnettes qui viennent décharger des marchandises essentiellement constituées de vivres frais. « Pour qu’une cargaison soit déchargée à l’intérieur du marché, le propriétaire doit payer entre 500 et 1000 francs supplémentaires au chauffeurs », explique un commerçant. C’est pourquoi, à cause de la marchandise qui est déchargée à l’extérieur, l’on peut voir du mouvement.

Devant l’immeuble à gauche de la façade principale du marché, pendant que certaines femmes sont couchées à même le sol, d’autres jaugent des sacs de piments, lampes-torches en main. Et c’est là, qu’à 03h50, un car stationne pour se décharger de ces autres sacs de piments qui lui sont à bord. A son arrivée, et celles que l’on croyait endormies, et celles que l’on croyait occupées, toutes ces femmes vont se hâter, les mains en l’air, vers le car pour ne pas rater la marchandise nouvellement arrivée. Plus bas de là, à l’entrée située vers la direction du marché, on passe peigne fin, une autre marchandise. L’on trie là-bas et sélectionne, bananes-plantains, pastèques, ananas pour une cargaison destinée, nous souffle-t-on, pour le Gabon voisin. Exactement au même endroit, une scène d’un autre genre. Alors qu’il déchargeait une camionnette, un jeune-homme détale avec deux régimes de plantain en mains. Mais ce dernier est aussi vite rattrapé par un collègue porteur, dans la grande satisfaction de Mama Elisette, propriétaire de la marchandise. Au même moment, non loin de là, un groupe de porteurs est tenu en respect dans les querelles par une vendeuse courroucée. Celle-ci les accuse d’avoir abandonné sa marchandise dans la camionnette au profit de celle d’une autre vendeuse. « On arrive ! Calme-toi tantine », tentent-ils de la calmer.

04h15, des prises de bec font des éclats de voix à l’intérieur du marché. Aux prises, un vendeur de tickets avec une vendeuse de légumes. «Madame vous ne valez pas ma femme, payez vôtre ticket c’est tout. Sinon j’emballe tout ça et je pars », menace l’agent communal. 04h30, l’affluence commence à se faire perceptible. Sur toutes ses entrées, du côté « Pont de la Gare » tout comme celui de « Camair », il y a déjà beau monde. A l’intérieur du Marché, si la plupart des boutiques restent fermées, des comptoirs sous les hangars vivent. Sur le sol noir et boueux des trottoirs, l’on peut voir des commerçants racler à l’aide des balais ou des pelles, quelques 1 ou 2 mètres carrés pour exposer la marchandise. Et ce, en attendant le passage des coupeurs de tickets qui, doivent valider toutes les occupations et emprises qui ne sont pas des boutiques et hangars. Mais l’exercice qui consiste à vendre des tickets à ces occupants n’est souvent pas un long fleuve tranquille. « A qui ces cageots de tomates ? » demande une voix d’homme devant le hangar n°7. Plus près, l’on voit un homme tenu tickets en mains, devant une dizaine de cageots de tomates. « A moi, Monsieur ! », lui répond quelques mètres plus loin ? la propriétaire, avant de continuer : « Vous allez attendre Monsieur parce que je suis en train de laver mes pieds ».

Entre-temps, le marché retrouve progressivement ses couleurs et sons habituels au fur et à mesure que le ciel s’éclaircit. 05h42, il devient difficile voire impossible à tout véhicule de franchir l’une des entrées du marché, à cause du monde qui grue et qui afflue désormais. Le marché vient d’être officiellement ouvert. Pour tout transport de marchandises, il faut désormais faire confiances aux « porteurs » qui rodent, ou aux conducteurs de brouettes qui, à travers toutes les ruelles et les artères du marché, taraudent.